Printemps 2003, route du col de la Cayolles (04), la végétation pointe à peine, mais les ronces d’acier sont bien là. Vestige de la folie des hommes, les barbelés de ce petit poste de tir gardent leur agressivité. Équipé, pour ne pas dire armé, d’un coupe boulon le contact avec les premiers fils sont difficiles. Au cœur du Parc national du Mercantour, il coupe, tranche dans la ligne les premiers mètres de barbelés. Par section, ils sont rassemblés en des grosses bottes bien attachées pour être poussés dans la pente. En les tenant avec une corde, ils arrivent jusqu’à la route et dans le coffre de la voiture. Première journée, premières expériences… Les bottes sont trop lourdes, ne sortent pas du coffre à la déchetterie. Le barbelé est très solidaire alors qu’il est conçu pour diviser les hommes.
Cette journée frappe à la porte de nombreuses autres et ouvre un engagement envers cette naturalité.
Automne 2003. La canicule a fait rage. Un des premiers cris d’alarme de la nature à l’appétit sans fin de l’homme pour le profit. Plusieurs sites de barbelés sont partis depuis ce printemps. Cette vallée avait un intérêt certain pour les fins stratèges. Toujours animé par ce désir d’intervenir dans ce milieu de montagne, je suis les nouvelles indications de mon ami. Ancien garde ONF, il connait chaque arbre… Le refuge de la Cayolle était sécurisé par une ligne téléphonique passant dans le fond du vallon. Les fréquentes avalanches malmenaient le réseau et à force interruptions et de réparations une liaison radio fut installée.
Encore loin de penser qu’une installation abandonnée puisse être démontée après usage, elle est laissée à la nature. A pieds, suivant les fils et les divers vestiges au sol, je parcours le tracé de la ligne. Sautant prairies, rochers, zones humides, les fils sont bien présents. Incompatibles avec ce milieu naturel, ils sont une nuisance, une atteinte au milieu. Pourtant le travail n’est par important pour tout remonter sur le bord de la route. C’est une question de vision de notre environnement, de celui que nous voulons pour notre bien-être.